Le travail, c'est la santé [ PV: Haku ]

La journée de travail d'Haru était déjà bien entamée. Elle n'avait pas pris une seule pause depuis le début et sentait peu à peu l'épuisement la gagner. Mais elle devait tenir bon, elle était loin d'avoir fini son travail. Marchant le long du couloir, il était extrêmement difficile de se frayer un chemin plus rapidement. Les gens, clients comme employés, allaient et venaient dans les deux sens, mais cela arrivait tous les jours. Haru ne se souvenait pas d'avoir vu une journée moins chargée qu'une autre, toute la maison était chargée d'esprits, tout le temps, sans répit, enfin c'est ce qu'elle avait pu constater. Commençant à être agacée par toutes ces personnes qui marchaient dans ce même couloir, elle essayait de garder son calme, et ce n'était pas facile tous les jours. La pauvre jeune femme avait la fâcheuse tendance à s'énerver très vite, mais son simple statut de servante ne lui permettait pas ce privilège, elle l'avait appris bien assez vite. On distinguait assez facilement les employés des clients, surtout ici. Les employés se pressaient, tout comme elle, tout du moins ceux de son niveau en tout cas, et les client traînaient, car eux avaient la chance d'avoir tout leur temps. Haru évitait de les pousser, mais c'était chose délicate. Elle devait arriver jusqu'à l'accueil en peu de temps pour demander une carte pour un bain, c'était une autre employée plus haut gradée qu'elle qui lui avait demandé ... ou plutôt ordonné. La jeune fille n'était alors pas irritée que parce que le couloir n'avançait pas beaucoup, mais bien parce qu'on l'avait traité comme un chien, et cela arrivait assez souvent dans ses journées de travail, mais le petit esprit trouvait toujours ça indignement grossier.

Enfin! Elle en avait fini de ce couloir. L'accueil était plus ou moins libre, il fallait presque prendre les cartes au vol, des fois. Haru s'avança jusqu'au comptoir où se trouvait une créature ressemblant à un crapaud. Ces êtres n'étaient pas rares du tout dans ce monde, la jeune femme s'était toujours habituée à cela, même si en général elle ne les aimait pas beaucoup.

<< Un bain aux algues, s'il vous plaît,

La créature la regarda de travers, Haru avait tout de suite compris le message. Ce méprisant crapaud la prenait comme une moins que rien pour être polie, il savait bien que ce n'était qu'une servante. La jeune femme avait les mains posées sur le comptoir; elle enfonça ses doigts sur le marbre bleu foncé et racla ses ongles en signe de colère intense pour calmer ses nerfs. Le guichetier le vit bien et lui donna la carte en bois repeinte en rouge avec un air de dédain sur le visage. La jeune femme s'en empara, prononçant un "Merci" plutôt amer. Elle savait que le fait d'être désagréable n'arrangeait pas sa situation, mais c'était plus fort qu'elle. Haru tourna les talons et entendit la voix de cet énergumène.

- Ne le fais pas tomber en route, je ne t'en redonnerais pas un >>

C'était fou comment les gens ne vous accordaient pas un centième de confiance dans cette maison! Haru se retourna, lui lança un regard empli d'acidité crue, montra qu'elle tenait fermement la carte d'un geste brusque puis repartit dans le couloir. Ce couloir d'ailleurs, était longé par les bains, et bien sûr la salle où elle devait se rendre se trouvait bien au fond. Et c'était reparti pour la balade dominicale insupportable. La jeune femme luttait contre elle-même pour ne pas exploser d'impatience, hurler et pousser tout le monde comme une dingue. Si un jour elle voulait sortir d'ici, il fallait qu'elle montre un minimum de sang froid et surtout de dignité. Le couloir avançait lentement comme à son habitude, et Haru sentait qu'elle allait recevoir une bonne réprimande de la part de sa supérieure. De toutes façons, tout était bon pour les insulter, les gens comme elle, les regarder en chien de faïence et leur montrer les recoins crasseux à nettoyer pour ensuite trouver mille autres excuses pour vous rabaisser. Un quotidien de servante. Il était difficile de faire la part entre ne pas se laisser faire et rester courtoise, en effet. Haru était bientôt arrivée quand ...

*Spaff*

Le bruit plat du bois tombé sur le parquet se fit entendre. Un client d'une corpulence indiscutable avait malencontreusement heurté la carte qu'Haru tenait et l'avait fait tomber au sol sans s'en rendre compte. La jeune fille courut en direction du rectangle rouge et se baissa pour le ramasser. On aurait dit que ce fichu crapaud lui avait balancé une malédiction pour la faire tomber quand même, cette maudite carte.

Comme d'habitude, j'avais beaucoup à faire. Il semblait étrange que tant de travail me revienne, alors que je semblais être haut-placé dans la hiérarchie... Oui, on aurait pu penser que je passais mes journées allongé à dormir dans ma chambre. mais ce n'était pas le cas, évidemment. Je marchais avec une vitesse incroyable, mes faufillant entre les énormes clients et les serviteurs maladroits. Je soupirai à cette pensée. Les couloirs étaient décidément trop étroit pour tout le monde... Sur les côtés, s'agitaient dans leur baignoire plusieurs de nos clients, attendant un massage ou quelque autre soin. Il faudrait penser à faire des travaux, et à agrandir un peu l'endroit, il devenait vraiment difficile de circuler.
Tout en continuant mon chemin, je fronçai les sourcils avec sérieux, me demandant comment on pourrait améliorer les choses. Et puis, que devais-je faire à présent ? Je m'arrêtai dans un coin pour réfléchir. Là où je ne serais dans le chemin de personne.

J'avais en une journée cuisiné de nombreux plats, si bien que mes doigts me faisaient mal à force d'avoir coupé les légumes. D'un air dépité, je regardai mes mains légèrement rougies. Oh, je n'avais pas le temps de me lamenter. J'avais sans doutes beaucoup devant moi. Mais j'eus beau réfléchir, rien ne me venait à l'esprit. Avais-je enfin terminé ma journée de travail ? Après tout, ne pas m'être reposé depuis le matin rendait les choses plus simples. J'étais satisafait de mon travail, et estimait qu'un peu de repos m'était bien dû. COmment pouvait-on nous faire travailler autant ? C'était inadmissible... Autrefois, je ne me rendais aps compte à quel point les choses pouvaient être terrible ici. Au moment où j'allais repartir vers ma chambre, un bruit attira mon attention. Une servante - semblait-il au vu de son habileté - venait de faire tomber sa carte de bois qui lui permettrait d'avoir de l'eau. Elle se précipita par terre pour la ramasser, mais déjà, j'étais apparu à ses côtés et lui tendait gentiment. Mon visage ne devait pas montrer une grande expression, c'est vrai. Mais je suppose qu'on pouvait y voir de la douceur et de la tendresse. Alors, je me remis debout et essuyai mon pantalon en le frottant de mes mains. Je relevai ensuite les yeux vers la servante. Mieux valait faire attention lorsqu'on se tenait au milieu du couloir.

Haru avança son bras pour attraper la carte quand quelqu'un la prit avant elle et lui tendit. La jeune fille sursauta un peu d'abord, surprise que quelqu'un lui rendre service, ici. Alors cet endroit n'était pas tout à fait hostile, finalement. Le jeune esprit leva la tête pour voir le visage de la personne qui l'avait aidé et vit que c'était un jeune homme. Mais la jeune femme ne s'attarda pas, ne voulant pas le faire attendre. Elle prit la carte et se releva en même temps que lui, lui adressant un sourire plein de gratitude. Il devait faire à peu près sa taille, voire un tout petit peu plus petit, le visage fin, les cheveux d'un noir intense et l'allure plutôt frêle. Mais son habit n'était pas le même que le sien. Haru savait qu'il y avait quelques différences d'uniforme selon les statuts, à ce qu'on lui avait expliqué, mais elle n'arrivait pas à retenir cela. De toutes façons, elle pouvait dire qu'il était au dessus d'elle, puisqu'elle était au niveau le plus bas, donc il était forcément plus haut gradé. La jeune fille se pencha en avant en signe de respect et de remerciement, et malgré le fait qu'elle n'ait pas reçu une éducation digne de ce nom, les bonnes manières étaient évidentes pour elle. Malheureusement elle avait l'impression que de moins en moins de gens les respectaient. Haru se redressa et avant de partir, elle allait quand même remercier le jeune homme par la parole, ce ne serait pas poli de partir sans rien dire, même si elle avait sourit et s'était courbée auparavant.

<< Merci beaucoup, je suis désolée d'avoir été si hâtive, j'en ai fait tomber ma carte. Excusez-moi, je dois partir, si ma supérieure me voit en retard, je risque de recevoir une bonne leçon. Bonne soirée,

Haru se retourna sur ses mots sans s'attarder sur le jeune homme, mais se retrouva en face du client qui avait fait tomber sa carte. Comment avait-il pu arriver là alors qu'il partait tout à l'heure dans cette même direction et l'avait déjà dépassée? La jeune fille décidait de ne plus faire attention à ce genre de choses, car apparemment ce n'était pas rare dans cette maison. Le jeune esprit voulut contourner le client en vain. Il prenait toute la place et bloqua bientôt tout le couloir. Les gens devant et derrière lui commencèrent à élever la voix de plus en plus haut. Décidément, ce n'était pas son jour. C'était inévitable, elle allait recevoir une corvée des plus pénibles infligée par sa supérieure, elle ne pouvait plus y échapper maintenant. Elle aurait beau s'expliquer, ce serait tout de même de sa faute ( de plus qu'elle avait fait tomber la carte, mais mieux valait passer ce moment sous silence ). Haru mit sa main sur son front, réfléchissant et se lamentant en même temps. Le bouchon prenait plus d'ampleur au fil des secondes.

- Oh, ce n'est pas vrai ... >>

- Merci beaucoup, je suis désolée d'avoir été si hâtive, j'en ai fait tomber ma carte. Excusez-moi, je dois partir, si ma supérieure me voit en retard, je risque de recevoir une bonne leçon. Bonne soirée

- Oh, ce n'est pas vrai ...

- Je connais un autre chemin, nous pourrons passer par là

Soudain, Haru sentit qu'on l'empoigna. Surprise une fois de plus, elle se retourna vivement, tellement vivement que ses cheveux blonds cachèrent son visage, et à se moment là, elle se sentit partir. La jeune fille s'empressa d'écarter ses mèches qui ondulaient tout en essayant de ne pas glisser et se casser la figure sur le parquet. Ayant désormais recouvert la vue, elle constata que c'était le jeune homme de tout à l'heure qui était en train de la mener quelque part en se faufilant entre les clients et les employés entassés dans le couloir. Sa vitesse et son agilité surprirent le jeune esprit.

<< Je connais un autre chemin, nous pourrons passer par là, lui dit-il.

Une aubaine! Décidément, ce garçon était vraiment courtois et gentil de l'aider dans sa situation plutôt délicate. Elle en avait vécu, pourtant, depuis qu'elle était arrivée ici, mais elle pensait que les employés, surtout ceux plus haut gradés qu'elle, ne savaient pas ce qu'était le mot "entraide" et passaient toujours leur chemin devant quelqu'un en détresse, vaquant à leurs occupations ... en fait, c'était sûrement ça, la raison. Ils étaient trop occupés. Mais lui alors, n'avait-il pas de tâche à accomplir? Peut-être avait-il fini, aujourd'hui ... Haru aimerait tant finir cette journée ... finir toutes les journées qu'elle aurait à endurer.
La course se termina et la jeune femme était revenue à son point de départ. Où aller maintenant? Elle ne connaissait qu'un chemin, et ce chemin était inaccessible. Le jeune homme avait déjà fait beaucoup pour elle, le lui demander serait l'importuner.

- Encore merci, je ... je dois vous avoir embêté avec mes problèmes, désolée. Je vous en suis reconnaissante, dit-elle pleine de gratitude.

Haru regarda autour d'elle, essayant de réfléchir où elle pourrait passer. Ne trouvant pas le moindre repère au loin, son regard se posa sur le jeune homme qui était encore là. À ce moment, la jeune fille remarqua qu'elle ne s'était pas présentée. Immédiatement, elle se remit face à lui et lui adressa la parole une nouvelle fois:

- Oh! Je suis désolée, je ne me suis pas présentée. Je suis ... Haru. >>

Qu'est-ce qu'elle détestait dire ce nom! Tout simplement car elle savait que ce n'était pas le sien ... mais quel était sa véritable appellation? À chaque fois qu'elle prononçait le mot "Haru", son regard se perdait dans le vague et elle se creusait les méninges comme personne ne pourrait imaginer, fronçant les sourcils et essayait en vain de se remémorer l'ancien prénom. Cette fois n'était pas une exception.

- Encore merci, je ... je dois vous avoir embêté avec mes problèmes, désolée. Je vous en suis reconnaissante

- Oh ! Je suis désolée, je ne me suis pas présentée. Je suis ... Haru

- Je suis Haku

- Je n'ai rien à faire, si tu veux, je peux t'aider dans ta tâche. Que dois-tu faire ?

Haru voyait que le jeune homme souriait. Tiens, c'était bon signe, ça. En y réfléchissant bien, est-ce que quelqu'un avait daigné lui sourire depuis son arrivée? Elle n'en était pas très sûre ... En tout cas ce garçon avait l'air très gentil. Et d'ailleurs ce premier abord la surprit elle-même, elle qui était de nature méfiante. Mais quand on était lâchés dans une communauté hostile, il était peut-être normal de sympathiser avec la première personne qui vous aidait un peu et vous souriait ... elle préférait croire ça.

<< Je suis Haku.

Le jeune homme lui dit son nom, il s'appelait Haku. La première pensée qu'elle eut fut que les prénoms "Haru" et "Haku" se ressemblaient ... une pensée qui ne servait pas à grand chose, mine de rien. Lui aussi avait vu son ancien nom volé, alors ... Elle songeait à ça à chaque fois que quelqu'un se présentait, ici. Haru se mettait à imaginer leur vie d'avant, à se rendre compte que tout était difficile pour eux aussi, rien qu'en quelques secondes. Cela la dépassait de passer en quelques instants de la frustration par rapport aux employés de la maison à de la pitié pour eux ... Mais le fait d'entendre le vacarme derrière elle et de se retourner pour voir le bouchon grandir de plus en plus lui enlevèrent bien vite ce sentiment pour faire place à celui de l'irritation. Personne pour s'associer et aider à décoincer le client, non. Il fallait que tout le monde passe en même temps, c'était d'une intelligence ... Peut-être auraient-ils mieux fait de rester là bas et de contribuer au bon fonctionnement du couloir. Tant pis. Ça leur apprendra. En les regardant faire, Haru roula des yeux et se détourna du spectacle. C'était n'importe quoi, cette mentalité. Chacun pour sa peau et le monde tourne rond.
Heureusement, les mots d'Haku la firent sortir de son indignation.

- Je n'ai rien à faire, si tu veux, je peux t'aider dans ta tâche. Que dois-tu faire ?

Haru ne savait pas quelle tête elle faisait en ce moment, mais elle était bien surprise. Décidément, elle allait bien l'aimer lui! La jeune fille sourit et leva les yeux au ciel. Lui avait-on envoyé un ange? Elle revint sur Haku et lui répondit, toujours en souriant:

- Ce serait vraiment, extrêmement gentil. Je dois rapporter cette carte au bain numéro ... 32 ... oui, 32! Ce n'est pas difficile du tout, mais je sais que quand j'y serais, on me réservera une punition digne de ce nom ... à cause du retard. Et bien sûr, l'histoire du bouchon de couloir ne sera pas crue, ou on me trouvera plusieurs excuses pour que je sois fautive.

Plus elle avançait dans sa phrase, plus son visage devenait grave. À la fin, elle était carrément inquiète. Se tenant droite comme un i, elle avait l'impression que tous ses nerfs étaient tendus à en éclater rien qu'à penser au sort qu'on allait lui réserver. Une tâche des plus ingrates, qui la ferait frémir rien que d'y penser ...

[Pardon de t'avoir fait attendre si longtemps ! J'espère pouvoir être capable de répondre plus rapidement à présent...]

Après que j'eus offert mon aide, Haru leva les yeux au ciel. Pas d'une manière agacée ou quoi que ce soit de négatif. Elle souriait et paraissait se réjouir à l'extrême à savoir que j'étais en mesure de l'aider. Je songeai alors que personne ne devait avoir été très gentil avec elle jusqu'à ce moment... Toujours, toujours, les employés d'Aburaya s'était montrés égoïstes et hypocrites, ne erspectant que ceux qui étaient plus fortsqu'eux. Je n'avais eu de problèmes qu'au début de mon séjour ici, il y a maintenant tant de temps... Rapidement, je m('étais fait un nom et chacun avait commencé à se sentir menacé par ma simple présence. Mais depuis quelques années, les choses allaient mieux. Le respect m'était dû, mais sans excès, ce qui me plaisait bien. En revanche Haru, apparemment toute nouvelle arrivée, devait sûrement se faire marcher sur les pieds, se faire pousser et se faire insulter... La vie ici n'avait jamais été facile pour personne...

- Ce serait vraiment, extrêmement gentil. Je dois rapporter cette carte au bain numéro ... 32 ... oui, 32! Ce n'est pas difficile du tout, mais je sais que quand j'y serais, on me réservera une punition digne de ce nom ... à cause du retard. Et bien sûr, l'histoire du bouchon de couloir ne sera pas crue, ou on me trouvera plusieurs excuses pour que je sois fautive., raconta Haru avec un sourire, alors que son ton semblait assez triste.

Comme je l'avais pensé, les choses n'allaient pas être faciles pour elle. Mais peut-être qu'avec moi à ses côtés, elle risquait moins de problèmes. Il nous suffisait d'y aller. Evidemment, depuis tout le temps que j'errais dans les longs couloirs du palais des bains, je n'avais plus besoin de réfléchir. Lorsque j'entendis 'bain 32', je sus en un seul instant où il se trouvait et comment y aller sans devoir se faufiler à travers la foule. Un simple détour nous permettrait de nous y rendre.

- Ne t'inquiète pas, je suis sûr que tout ira bien, dis-je en posant un silence à la fin de ma phrase. Pour aller au bain 32, il nous faudra passer par là, ajoutais-je en montrant une direction du doigt. Le chemin de devrait pas être trop long. Tu viens ?

Directement, je me mis en route. Je ne marchais pas trop vite : de toutes manières, Haru serait en retard, un peu plus ou un peu de changerait rien à la sentence qui lui était réservée par les autres employés. Je jugeai donc que nous pouvions prendre un peu de temps. Oh, comme ceux qui nous voyaient faisaient de drôles de têtes en réalisant que nous marchions ensemble. Etait-ce si inhabituel ? Sans doutes...

» Haku [Terminé]